«Le médecin, c’est vous»
«On ne fait pas de l’ésotérisme, ni de la magie. La naturopathie se base sur un cursus de formation et des règles biologiques sérieuses», assure ce passionné (Photo: Didier Sylvestre)
Pour Hervé Caille, naturopathe, tout le monde peut devenir son propre médecin. Conseils de coach.
Pour l’Organisation mondiale de la santé, la naturopathie est la «médecine traditionnelle» occidentale. Hervé Caille préfère parler de «lois élémentaires de la vie», pour garder une bonne santé toute l’année…
Entretien avec notre journaliste
Romain Van Dyck
Quel est le rôle d’un naturopathe?
Hervé Caille : Celui d’éducateur de la santé. Le naturopathe est un coach, il transmet les lois élémentaires de la vie et pas seulement quand la personne est malade. Car la maladie est le dernier maillon de la chaîne des maux.
Mais que soignez-vous?
La naturopathie intervient, par exemple, dans des cas d’asthme, d’hypertension, d’acné, de migraine, de troubles du sommeil, de stress… lorsque la maladie est à son stade aigu et chronique ou, idéalement, en prévention de la maladie. Mais attention, nous avons une déontologie qui nous fixe des limites et on s’y tient. On ne prendra jamais la place d’un médecin, on ne dira jamais d’arrêter un traitement médical et on ne prendra pas une personne qui vient avec une pathologie grave.
Comment se passe la première séance?
D’abord, je demande à la personne de se présenter et de m’expliquer ce qui l’amène. Je n’ai pas besoin d’instrument, ni de toucher la personne. Je lui pose des questions, on échange. Une fois que le bilan de santé est établi, on rentre dans la naturopathie. Tout ne peut pas être réglé en une séance, il faut un suivi pour déterminer les règles de vie à travers trois cures.
C’est-à dire?
La première est une cure de détoxication visant d’abord à nettoyer l’organisme de ses toxines et d’entamer un allègement de l’apport alimentaire.
Bref, un régime?
Non, car un régime vise seulement à faire perdre du poids, alors que là, il s’agit d’apprendre à être en bonne santé toute l’année. On va, par exemple, apprendre à moins solliciter le système digestif. On va aussi faire travailler ce que l’on appelle les émonctoires, c’est-à-dire les organes d’élimination : le système digestif, les reins, les poumons, la peau… On va utiliser des tisanes naturelles ou des huiles essentielles pour favoriser la détoxication… Et on rééquilibre les humeurs du corps essentiels également à la santé dont le sang, la lymphe, la bile, sachant que le corps humain est composé à 70% de liquides.
Et la deuxième cure?
C’est une cure de revitalisation. On fait en sorte que le corps travaille mieux, par exemple avec des techniques de relaxation. Une personne qui pense trop va utiliser beaucoup d’énergie dans le mental, énergie qui devrait être disponible pour la digestion. La revitalisation passe aussi par des choses élémentaires comme l’activité sportive, des techniques de respiration…
Certains naturopathes parlent de libérer l’énergie vitale auto-guérisseuse… Cela ne doit pas convaincre tout le monde!
C’est vrai que c’est encore délicat d’en parler en Occident, c’est pourquoi, moi, je préfère parler de système immunitaire. Mais l’énergie vitale, c’est quoi? Ce sont les cellules de notre corps, donc la vie. Et dans cette revitalisation, l’alimentation joue un rôle central. L’une des clés, ce sont les combinaisons alimentaires. Par exemple, associer de la viande à du gluten ou terminer un repas par un fruit peut compliquer la digestion. Et si une personne mange deux fois de la viande par jour, on va lui conseiller de ne le faire qu’une fois. Dans tous les cas, ce changement alimentaire est progressif, on monte en puissance petit à petit. Et on n’est pas là pour faire du terrorisme alimentaire, je ne vais pas demander aux gens de devenir végétaliens et de ne manger que des graines germées!
Et la troisième cure?
Il s’agit de pérenniser ce qui a été appris, de s’assurer que la personne a intégré les clés d’une meilleure hygiène de vie, qu’elle applique certaines règles toutes simples, au quotidien.
Avez-vous déjà connu des échecs?
Comme la naturopathie demande une forte participation de la personne, chez certains, il y a une sorte d’effet miroir : on voit tout ce qui ne va pas chez soi, cela fait resurgir beaucoup de choses et donc ça peut décourager. C’est pourquoi on travaille aussi à soulager le mental.
La naturopathie revient à mixer plusieurs disciplines médicales?
Je préfère parler de techniques. J’utilise par exemple la bromatologie pour l’hygiène alimentaire, mais jamais je ne me qualifierai de nutritionniste… La naturopathie se base sur une dizaine de techniques, dont la phytothérapie qui utilise les plantes, l’hydrologie avec les soins par l’eau, la psychologie, la pneumologie, la biokinésie qui est l’art du mouvement…
Au bout du compte, vous prescrivez des conseils. Payer pour des conseils, est-ce toujours bien accepté?
Là encore, ce n’est pas répandu dans la culture occidentale, mais dans d’autres cultures, la prévention est autant sinon mieux considérée que l’approche symptomatique qui, elle, intervient après les dégâts. Aux États-Unis, la naturopathie est déjà reconnue et c’est une pratique répandue au Canada, au Portugal, en France…
Et au Luxembourg?
Au Luxembourg, on est entre les deux… Mais, à vrai dire, pour moi, le but n’est pas la reconnaissance ni d’entrer dans un corporatisme médical. Mon but, c’est d’amener les gens à devenir leur propre naturopathe. Et c’est en cela que la naturopathie est efficace, car le médecin, c’est vous. Par exemple, quand quelqu’un vient pour un problème de surpoids, les résultats sont efficaces sur le long terme, à la différence de beaucoup de régimes. Et l’avantage de la naturopathie, c’est qu’il n’y a pas d’effet secondaire, puisqu’il n’y a pas de médicament, juste une meilleure hygiène de vie.
Je tiens à remercier Mr Romain Van Dyck qui m’a interviewé, pour son professionnalisme, son écoute et son attention à un sujet particulièrement brulant.
Le Journal: Le Quotidien
Hervé Caille (c) 2024